
Dolores O'Riordan, chanteuse de The Cranberries, est décédée aujourd'hui à 46 ans. En 1994, son groupe explosait à la face du monde avec un hit mondial en guise de single : « Zombie ». Une chanson lourde de sens, écrite en réaction à un attentat perpétré en Angleterre, et qui donnera lieu à une controverse, la première d'une longue liste pour la chanteuse à la voix si particulière.
Décédée subitement lors d'une session studio à seulement 46 ans, Dolores O'Riordan, chanteuse du groupe irlandais The Cranberries, laisse derrière elle 40 millions d'albums vendus, six album avec son groupe, deux en solo, et surtout un tube : « Zombie ». Une chanson simple, avec une ligne vocale qui fait mouche, et surtout au message lourd de sens, qu'il n'est pas toujours aisé de comprendre à la première écoute.
https://www.youtube.com/watch?v=6Ejga4kJUts
L'attentat de Warrington en 1993.
De prime abord, « Zombie » traite des guerres en général, et des populations qui en subissent les dommages collatéraux. Pourtant, dès le second couplet, elle chante : « It's the same old theme / Since nineteen-sixteen » (« C'est la même rengaine / Depuis mille-neuf-cent-seize »).
L'année 1916 est en fait celle qui marque l'Insurrection de Pâques, où des membres de l'Irish Citizen Army et de l'Irish Volunteers Force ont pris d'assaut des bâtiments stratégique de Dublin, notamment la Poste centrale, puis ont déclaré la création de la République Irlandaise.
C'est le début d'un soulèvement catholique dans le pays qui ne faiblira plus ou presque jusqu'à la victoire du parti Sinn Féin aux élections de 1918, et à l'éclosion de son leader, Eamon de Valera.« Zombie » sort en 1994 sur le second album du groupe, « No Need To Argue ».
L'année précédente, un double attentat à la bombe était perpétré par l'IRA provisoire (Irish Republican Army) le 20 mars à Warrington, dans le nord-est de l'Angleterre. Deux morts (Jonathan Ball, trois ans, et Tim Parry, douze ans) et quatre-vingt-seize blessés sont à déplorer. L'événement marque profondément l'opinion publique ainsi que Dolores O'Riordan et son groupe.
À l'époque, la formation est en pleine tournée anglaise. En 2008, la chanteuse se souvenait : « Je me rappelle qu'à ce moment-là, il y avait beaucoup de bombes qui explosaient à Londres, les troubles étaient violents. Ces bombes explosaient dans n'importe quels endroits, ça aurait pu tomber sur n'importe qui. Il est difficile de faire une chanson là-dessus, mais quand tu es jeune, tu ne réfléchis pas deux fois avant d'agir, tu te saisis de la chose et tu le fais. En devenant plus âgé, tu développes une certaine peur, tu appréhendes plus les choses. Mais quand tu es jeune, tu n'as peur de rien. »
Succès en plein cessez-le-feu.
Le clip est bien plus explicite que les textes. On y voit des enfants courir dans des rues semblables à celles du Belfast des années 1980, durant les troubles, des murals (ces fresques à messages sociaux et politiques peintes dans les quartiers protestants ou catholiques irlandais)... La référence est claire, et les paroles, écrites par Dolores O'Riordan, n'en sont que bien plus compréhensibles.
Au magazine Team Rock, elle ajoutait : « Nous étions très occupés à cette époque, on travaillait toute la journée. Cette chanson m'est venue quand nous étions à Limerick (sud-ouest de l'Irlande), je l'ai d'abord écrite en m'accompagnant simplement d'une guitare acoustique, tard le soir. Je me rappelle être dans mon appartement, trouver le refrain, qui était très accrocheur, qui sonnait comme un hymne. Je l'ai donc amené à une répétition, et j'ai pris la guitare électrique. J'ai enclenché la distorsion, et j'ai dit à Ferg (Fergal Lawler, batteur du groupe, ndlr) : « Peut-être que tu pourrais battre le rythme très fort... » Même en étant écrite en acoustique, cette chanson est devenue un gros rock. »
Le clip est bien plus explicite que les textes. On y voit des enfants courir dans des rues semblables à celles du Belfast des années 1980, durant les troubles, des murals (ces fresques à messages sociaux et politiques peintes dans les quartiers protestants ou catholiques irlandais)... La référence est claire, et les paroles, écrites par Dolores O'Riordan, n'en sont que bien plus compréhensibles.
Au magazine Team Rock, elle ajoutait : « Nous étions très occupés à cette époque, on travaillait toute la journée. Cette chanson m'est venue quand nous étions à Limerick (sud-ouest de l'Irlande), je l'ai d'abord écrite en m'accompagnant simplement d'une guitare acoustique, tard le soir. Je me rappelle être dans mon appartement, trouver le refrain, qui était très accrocheur, qui sonnait comme un hymne. Je l'ai donc amené à une répétition, et j'ai pris la guitare électrique. J'ai enclenché la distorsion, et j'ai dit à Ferg (Fergal Lawler, batteur du groupe, ndlr) : « Peut-être que tu pourrais battre le rythme très fort... » Même en étant écrite en acoustique, cette chanson est devenue un gros rock. »
https://www.youtube.com/watch?v=7nKZt8uz9ZM
Les accents très grunge de cette chanson ne sont pourtant pas si représentatifs que cela du son de The Cranberries, plus habitué aux ballades pop. Mais le message doit passer, quitte à pousser le volume. Le problème, c'est que le morceau, écrit donc en 1993, ne sort qu'en 1994, année de signature du cessez-le-feu entre les deux camps belligérants. Accusée par certains de mettre de l'huile sur un feu en train d'être éteint, Dolores O'Riordan fait alors face à sa première controverse. Il y en aura d'autres.
Une image conservatrice et des propos aiguisés
Fervente catholique, elle s'est opposée ardemment à l'avortement dans son pays natal. En 1995, en pleine gloire, elle déclarait par ailleurs aux Inrockuptibles : « Dans certains cas, je suis pour la peine de mort. À Singapour, on coupe les mains des voleurs, on coupe les têtes des meurtriers. Résultat : il n'y a plus de crime. »
Notons que depuis des années, Singapour est contrôlé par une police extrêmement stricte qui certes laisse peu de place aux délits, mais aussi aux libertés individuelles.
Sur le féminisme, elle affirmait : « Pour moi, c'est quelque chose pour les filles qui se sont fait plaquer trente fois dans leur vie et qui décident que les hommes sont tous des ordures. » Ça a le mérite d'être clair.
Une image conservatrice très critiquée en Irlande et qui collera au groupe tout au long de sa carrière. Ce qui ne l'empêchera pas de vendre des millions d'albums, d'enchaîner les tournées monstres, jusqu'au décès de sa frontwoman ce lundi.