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Camion hydrogène : y-a-t-il un Nikolagate ?


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Coup de tonnerre chez Nikola Motor Company ! Le constructeur américain - partenaire d'Iveco dans les camions électriques batteries et hydrogène - traverse une grosse zone de turbulences depuis trois semaines suite à des accusations de « fraude complexe » concernant sa technologie et les performances de ses futurs camions à hydrogène.

Sous le feu des critiques, son président et fondateur, Trevor Milton (en photo ci-dessus), a fini par démissionner de son poste de président du conseil d'administration le 20 septembre. C'est un ancien de General Motors, Stephen Girsky, qui le remplace à la tête du board, tandis que Mark Russell reste le directeur général de la start-up fondée en 2015.

Un départ sur les chapeaux de roue.

Depuis son entrée au Nasdaq en juin dernier, tout semblait pourtant réussir à Nikola et Trevor Milton. L'action grimpe à grande vitesse, jusqu'à atteindre une capitalisation boursière dépassant celle de nombreux constructeurs automobiles historiques comme Ford ou Fiat Chrysler.

Le tout, sans avoir jamais vendu un seul véhicule, ni même avoir une usine opérationnelle ! Les travaux du site d'assemblage de Coolidge (Arizona) n'ont en effet débuté qu'à la fin du mois de juillet.

Mais les bonnes nouvelles se succèdent avec l'annonce en août d'une méga commande de 2 500 bennes à ordures ménagères électriques (+ 2 500 autres en option) par Republic Services, le numéro 2 de la collecte des déchets aux États-Unis.

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Pour le contrat avec Republic Services, Nikola prévoit d'utiliser la plateforme du Nikola Tre développée avec Iveco. Le camion sera livré tout équipé (châssis + carrosserie) et disposerait d'une autonomie de 240 km. Les premières livraisons sont prévues pour 2023.

Et surtout, il y a ce partenariat avec General Motors (GM), rendu public le 8 septembre, qui pour 2 milliards $ prendrait une participation de 11 % dans la jeune pousse.

En contrepartie, le constructeur automobile de Detroit doit fournir ses batteries Ultium et ses piles à combustible Hydrotec au pick-up hydrogène Nikola Badger, et doit aussi participer à sa production. L'accord est salué par les investisseurs et fait monter les actions de Nikola jusqu'à 53% le jour de l'annonce.

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Le pick-up hydrogène Nikola Badger.



Arnaque ou raid boursier ?

C'est un rapport publié par le cabinet Hindenburg Research deux jours plus tard, le 10 septembre, qui a mis le feu aux poudres. Ce fonds d'investissement activiste basé à New York affirme que la start-up de Phoenix est « une fraude complexe fondée sur des dizaines de mensonges concernant la technologie et les performances de ses véhicules ».

Pour les analystes d'Hindenburg, Nikola et son business model ne serait en effet qu'une coquille vide. L'entreprise ne possèderait pas la technologie qu'elle veut vendre, ne serait pas capable de réduire le coût de la propulsion à hydrogène, n'aurait toujours pas de camion prototype roulant et prêt à être testé en conditions réelles.

Pour étayer ce point, ces derniers ont révélé que le Nikola One présenté par la société dans une vidéo promotionnelle en 2018 dévalait en fait une pente sans aucune groupe motopropulseur fonctionnel à bord. Ce que le constructeur a depuis admis.

https://www.youtube.com/watch?v=IAToxJ9CGb8

En résumé, ils accusent Trevor Milton d'avoir sciemment menti et vendu du rêve dans le but d'attirer partenaires et investisseurs. À la fin dudit rapport, ils posent donc à la direction de Nikola 53 questions « auxquelles ils pensent que les actionnaires méritent des réponses ».

Nikola s'est aussitôt défendu par voie de communiqué de presse, qualifiant le rapport d'opportuniste pour faire chuter le cours de l'action et remplir les poches d'Hindenburg, spécialiste de la vente à découvert, qui avait des positions « short » sur le titre, c'est à dire une position de vente pariant sur la baisse de la valeur.

La défense de la start-up n'a toutefois pas suffi à empêcher le titre Nikola de plonger de 60 %. Dans la foulée, le ministère américain de la Justice et la SEC - le gendarme de Wall Street - ont lancé des enquêtes, reste à savoir si celles-ci portent sur les allégations à l'encontre de Nikola ou sur une éventuelle manipulation du cours de l'action de la start'up par Hindenburg.

GM et Bosch ont indiqué le 21 septembre qu'ils maintenaient leurs projets de coopération respectifs Nikola. Du côté de CNH International (la maison mère d'Iveco), c'est silence radio pour l'instant, mais on continue de s'activer à Ulm en Allemagne sur l'assemblage des premiers protos du Tre.

Nikola contre-attaque.

En attendant les conclusions des investigations, Stephen Girsky a repris les rênes de la start-up avec pour mission de redresser la situation et de restaurer la confiance en tenant les promesses faites par Trevor Milton.

La jeune pousse vient d'ailleurs de publier un nouveau communiqué précisant « sa stratégie et vision pour fournir des solutions technologiques, énergétiques et de transport innovantes : Nikola est un innovateur et un intégrateur. Le modèle Nikola combine notre propre propriété intellectuelle et notre technologie exclusive avec celles de nos partenaires commerciaux et fournisseurs stratégiques ».

Outre la clarification de son business model et du rôle de ses partenaires, Nikola y précise également sa feuille de route industrielle et le calendrier prévisionnel de mise en production de ses différents modèles de camions.

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Le constructeur américain s'attend ainsi à ce que le premier lot de cinq prototypes du Nikola Tre développé avec Iveco et FPT (100 % électrique à batterie), soit terminé dans les prochaines semaines.

Ils seront ensuite testés au banc et testés sur route en Allemagne. « Nous restons confiants dans notre capacité à démarrer la production du Tre et à le mettre à la disposition des clients à partir du quatrième trimestre 2021 », indique la start-up de Phœnix.

En ce qui concerne les Nikola One et Two, Nikola prévoit d'assembler quelques prototypes de pré-série équipés de la technologie fuell cell de Bosch d'ici la fin de 2021, afin de les tester en conditions réelles au cours du premier semestre 2022. La production de série serait quant à elle programmée pour fin 2023.