Prototype & Emergence.
Cyberpunk : origines, thématiques, jeu vidéo et œuvres cultes.
“Les androïdes rêvent-ils de moutons électriques ?” (ou Do Androids Dream of Electric Sheep?) de Philip K. Dick publié en 1968 n'est pas un récit cyberpunk à proprement parler, mais bien une ébauche, un prototype de ce qu'adviendra ce sous-genre. Cette oeuvre culte pose simplement les grands principes de ces futurs néo-noir dystopiques gangrénés par une économie insatiable et une technologie aliénante... un contexte idéal pour questionner la place de l'humain. En 1975, soit 8 ans avant la naissance du terme “cyberpunk”, John Brunner accouche de la première nouvelle qualifiée a posteriori de cyberpunk... "Sur l'onde de choc" ou (The Shockwave Rider).
Entre temps, le magazine de bandes dessinées français Métal Hurlant édité par Les Humanoïdes Associés voit le jour, et s'inscrit dans ce courant. The Long Tomorrow (1976) scénarisé par Dan O'Bannon et illustré par Moebius, mais aussi Extermination 17 (1979) de Enki Bilal sont alors les dignes représentants du cyberpunk “made in” France. Ces mêmes auteurs délivreront au cours des années 80 deux des sagas de S-F les plus emblématiques du 9e Art, à savoir L'Incal (1980 - 1988) et la trilogie Nikopol - La Foire aux immortels, La Femme piège et Froid Équateur (1980 - 1983).
De l'autre côté de la manche, le premier comics cyberpunk fait des siennes en mars 1977 dans un hebdomadaire britannique de BD de science-fiction. 2000 AD y dépeint les aventures dans Mega-City One du juge, juré, et bourreau Judge Dredd. Cet anti-héros ultraviolent appliquera une justice expéditive dans les salles obscures en 1995 et 2012 avec respectivement Sylvester Stallone et Karl Urban dans le rôle principal.
C'est un film qui impose le cyberpunk et sa vision pessimiste du futur dans l'imaginaire collectif. Blade Runner est l'adaptation cinématographique réalisée par Ridley Scott (Alien, Thelma & Louise, Gladiator) de la nouvelle “Les androïdes rêvent-ils de moutons électriques ?” de Philip K. Dick.
Bien que le film ne soit pas un succès à sa sortie en juin 1982, il deviendra pour les générations futures la quintessence même du cyberpunk aussi bien dans son esthétique dystopique et néo-noir que dans les thématiques abordées. Un mois plus tard, Tron projette sur grand écran le concept d'univers virtuel et surtout de cyberespace via des visuels 3D révolutionnaires pour l'époque. Ce métrage réalisé par Steven Lisberger servira d'inspiration à l'auteur William Gibson pour concevoir son oeuvre majeure.
William Gibson est l'un des principaux artisans du cyberpunk et de sa popularisation auprès du grand public. Après plusieurs publications telles que Johnny Mnemonic en 1981 et Burning Chrome un an plus tard, cet auteur américano-canadien bouleverse la science-fiction. Neuromancien (ou Neuromancer) s'écoule à 6,5 millions d'exemplaires aux quatre coins du globe, et devient un modèle pour tout un pan de la littérature qui trouve dans ce roman une formule “cyberpunk” maintes fois appliquée depuis.
La réalité virtuelle sur laquelle repose le mythe qu'est devenu Matrix s'inspire fortement de certains concepts établis par ce roman. Count Zero (1986), et Mona Lisa Overdrive (1988) complètent avec Neuromancien une trilogie intitulée “Sprawl”, connue également sous le nom de Matrix Trilogy. La boucle est ainsi bouclée. A noter que Keanu Reeves qui incarne Neo dans la trilogie des soeurs Wachowski prête ses traits au héros d'une autre adaptation des oeuvres de W. Gibson... Johnny Mnemonic (1995).