ToutSurTout.biz
Espagne : histoire


https://www.world-lolo.com/images/uploads/image.num1713688240.of.world-lolo.com.png



Des Phéniciens aux Romains

Colonisée, principalement sur ses côtes, par les Phéniciens, les Grecs, les Carthaginois, la péninsule voit se mêler à l'intérieur populations celtes et ibères. Passée sous la domination romaine après la fin de la deuxième guerre punique qui oppose Rome à Carthage entre 218 et 201 avant J.-C., l'Espagne connaît une prospérité durable et un niveau de culture élevé. Elle se christianise à partir du iie siècle.

L'Espagne wisigothique (ve-viiie siècle)

En 409, les Barbares pénètrent en Espagne, qui devient le champ de bataille des envahisseurs jusqu'à ce que les Wisigoths s'imposent, assurant une relative sécurité à la péninsule pendant près de deux siècles.

L'Espagne musulmane (viiie-xive siècle)

La monarchie wisigothique s'effondre d'un coup en 711, à l'arrivée des conquérants arabo-berbères. Au brillant règne du califat omeyyade de Cordoue succède au xie s., un morcellement entre puissants seigneurs autonomes (taifas) qui ne peuvent résister aux offensives des petits royaumes chrétiens du Nord de la péninsule (→ León, Castille, Navarre et Aragon). Les Almohades sont défaits entre 1212 (défaite de Las Navas de Tolosa) et 1248 (prise de Séville par les Castillans). Mais le royaume musulman de Grenade tient encore deux siècles, tandis que le pouvoir royal espagnol s'affermit peu à peu, malgré les divisions des royaumes chrétiens.

De la Reconquête chrétienne au Siècle d'or (xve-xviie siècle)

Achevée par Isabelle de Castille et Ferdinand d'Aragon avec la prise de Grenade en 1492, la Reconquista (Reconquête) a préparé, sous la bannière du catholicisme, l'unification du royaume. Parallèlement, la découverte de l'Amérique par Christophe Colomb, au service d'Isabelle, ouvre à l'Espagne un empire colonial dont elle exploite les richesses pour asseoir sa puissance. Elle connaît ainsi son « Siècle d'or » au xvie siècle avec l'avènement des Habsbourg qui porte sur le trône d'Espagne l'empereur Charles Quint, puis son fils Philippe II.

Entre conservateurs et progressistes - instabilité (xviiie-xixe siècle)

En déclin au xviie siècle, le pays se redresse à la suite de la guerre de succession d'Espagne et à l'accession au trône des Bourbons en 1700.

À partir du xixe siècle, si la guerre d'indépendance contre l'occupation napoléonienne (1808-1814) fortifie le sentiment national, l'instabilité politique s'installe : affrontement entre libéraux et monarchistes, progressistes ou conservateurs, coups d'État à répétition (pronunciamentos). La Restauration met fin à la brève Ire République (1873-1875) et le parlementarisme de façade (1876) ne résiste pas au coup d'État de Primo de Rivera (1923).

De la dictature à la démocratie (xxe siècle)

La fragile IIe République (1931) débouche sur la guerre civile d'Espagne (1936-1939) remportée par le général Franco, dont le régime, entre autarcie et ouverture, parvient à durer trente-six ans.

À la mort de Franco (1975), l'héritier de la couronne, Juan Carlos Ier, préside, en étroite collaboration avec le chef du gouvernement Adolfo Suárez, à la « transition » démocratique du pays (1976-1982), tandis que resurgit la question des « nationalités » et des autonomies régionales (→ Catalogne, Pays basque).

IBÈRES, PHÉNICIENS, CARTHAGINOIS, GRECS, CELTES...

https://www.world-lolo.com/images/uploads/image.num1713688393.of.world-lolo.com.jpg


Peintures rupestres d'Altamira



L'Espagne est peuplée dès le paléolithique inférieur, ainsi que l'attestent divers restes de culture troglodyte caractéristiques de l'époque du Neandertal. Le paléolithique supérieur est marqué par deux importantes cultures : celles d'Altamira et du Levant espagnol. Les auteurs de l'Antiquité attribuaient aux « Ibères » - dont l'origine rest discutée -, la civilisation néolithique de la Péninsule. Quoi qu'il en soit, du IIIe au Ier millénaire avant J.-C., les progrès techniques (sparterie, céramique, agriculture, cuivre, bronze et sans doute même fer) s'y succèdent.

Dès la fin du IIe millénaire avant J.-C., l'Andalousie entre dans le circuit commercial méditerranéen : Phéniciens, puis Grecs viennent y chercher l'argent, le plomb, le cuivre et surtout l'étain, rare en Orient et nécessaire à l'industrie du bronze.

Les uns et les autres implantent des comptoirs sur les côtes méditerranéennes et jusqu'à l'embouchure du Guadalquivir. Phéniciens et Carthaginois s'installent surtout au sud : Gadir (Cadix), Sexi (Almuñécar), Carteia (Algésiras), Malaca (Málaga), Abdèra (Adra). Mais ils remontent vers le nord, à Lucentum (Alicante), près du cap Artémision, et à Ebusus (Ibiza, aux Baléares, vers 652 avant J.-C.).

Les Grecs de Phocée et de Massalia (Marseille), en sens inverse, fondent leurs comptoirs au nord-est (Emporion, Rhodê), puis à l'est (Hemeroskopeion, Artémision) et poussent vers le sud ; ils parviennent même, exceptionnellement, à Tartessos. Mais Grecs et Carthaginois s'opposent en Méditerranée occidentale, et l'expansion phocéenne est brisée au large d'Alalia (aujourd'hui Aléria, en Corse) par une coalition de Carthaginois et d'Étrusques (535 avant J.-C.).

https://www.world-lolo.com/images/uploads/image.num1713688342.of.world-lolo.com.jpg


La Dame d'Elche


Des échanges entre colons et indigènes est née une civilisation complexe, mal connue, dont les témoins les plus remarquables sont les bustes de la Dame d'Elche et la Dame de Baza.

Parallèlement à la civilisation côtière, des mouvements de peuples se produisent à l'intérieur, sous la forme d'une lente infiltration celte à partir de la Gaule. De la fusion entre Celtes et Ibères est issu le fond commun « celtibère » de la population ibérique.

L'ESPAGNE ROMAINE (IIIe S. AVANT J.-C.-Ve S. APRÈS J.-C.)
ROME CONTRE CARTHAGE : LA CONQUÊTE

https://www.world-lolo.com/images/uploads/image.num1713688393.of.world-lolo.com.jpg


La deuxième guerre punique



Carthage, pour compenser les pertes subies lors de la première guerre punique contre Rome (264-241 avant J.-C., entreprend la conquête de l'Espagne. Hamilcar Barca impose sa domination à l'est du pays jusqu'à Barcelone, qu'il fonde. Il meurt en assiégeant Elche (229 avant J.-C.), et les Romains arrêtent sur l'Èbre, en 227, son successeur Hasdrubal, qui construit alors la forteresse de Carthago nova (Carthagène).

Hannibal lui succède en 221 avant J.-C. et déclenche la deuxième guerre punique, dès 219, par la prise de Sagonte, alliée de Rome. Tandis qu'il combat en Italie, Rome conquiert l'Espagne : les frères Scipion sont vaincus en 211 avant J.-C., mais le fils de l'un d'eux, le futur « Africain », se rend totalement maître des possessions carthaginoises après sa victoire à Zama (202 avant J.-C.).

Rome met 64 ans à imposer sa domination aux indigènes ; les dernières luttes sont marquées par des résistances farouches : soulèvement de Viriathe (147-139) ; guerre de Numance et destruction de la ville par Scipion Émilien (133 avant J.-C.). La bordure nord de la Péninsule (Galice, Asturies, Cantabrie) ne sera définitivement pacifiée que sous Auguste, en 19 avant J.-C.

L'ORGANISATION PAR ROME DE LA PÉNINSULE
L'importance politique de l'Espagne dans le domaine romain apparaît dès le premier siècle de la conquête et se prolonge à travers l'empire : Sertorius se révolte contre Sulla et tient victorieusement tête à Pompée jusqu'à son assassinat (82-72 avant J.-C.), s'appuyant sur les dernières résistances indigènes. Les fils de Pompée y luttent contre César jusqu'à leur écrasement à Munda (44 avant J.-C.). Auguste en dirige lui-même l'occupation (26 avant J.-C.), ainsi que les opérations au nord de la Péninsule. C'est à Clunia, en Tarraconaise, dont il est gouverneur, que Galba se proclame, en 68 après J.-C., legatus senatus populique romani, en attendant d'être nommé empereur par le sénat. Trajan, puis Hadrien naissent à Itálica (près de l'actuelle Séville) ; la famille de Marc Aurèle a de fortes attaches en Espagne.

Jusqu'en 27 avant J.-C., la Péninsule forme deux provinces, l'Espagne Citérieure au nord-est, l'Espagne Ultérieure au sud et à l'ouest. Auguste divise alors cette dernière en deux nouvelles provinces, la Lusitanie et la Bétique. Après la conquête du Nord, la Galice est rattachée à la Lusitanie, les Asturies et la Cantabrie à l'Espagne Citérieure. En 2 avant J.-C., la Galice est également incorporée à cette dernière qui devient la Tarraconaise. Le statut de cette région est fréquemment modifié jusqu'à la fin du iiie siècle.

À ce moment, Dioclétien, dans le cadre de sa grande réorganisation administrative, crée le diocèse d'Espagne, composé de cinq provinces ibériques (Lusitanie, Bétique, Gallaeçia [Galice et Asturies], Tarraconaise et Carthaginoise [sud de l'ancienne Tarraconaise]) et de la Mauritanie Tingitane (Maroc actuel).

UNE PROVINCE PROSPÈRE
La paix romaine règne quatre siècles dans la Péninsule, de la fin des guerres cantabriques d'Auguste à la conquête barbare, au début du ve s. après J.-C. La prospérité semble s'y maintenir plus longtemps et à un plus haut niveau que dans la plupart des autres provinces de l'Empire. Une soixantaine d'exploitations minières importantes sont en service (fer, plomb, cuivre, zinc, étain, mercure). Les seules excavations du río Tinto (cuivre) témoignent de l'extraction de quelque 20 millions de tonnes en 600 ans. Plusieurs villes dépassent 100 000 habitants (Emerita Augusta, Tarraco, Hispalis, Corduba, c'est-à-dire Mérida, Tarragone, Séville, Cordoue). Nombre d'autres approchent ce chiffre.

Le niveau culturel du pays est à la hauteur de son niveau économique : Sénèque, Martial, Quintilien sont des Espagnols. Le christianisme fait son apparition dans la Péninsule dès le iie siècle. Les premiers conciles nationaux se tiennent à Iliberis (306), à Saragosse (380), à Tolède (400). Le pape Damase, les poètes religieux Juvencus et Prudence, tous trois espagnols, témoignent de la profonde implantation du christianisme dans le pays au ive s.

L'ESPAGNE WISIGOTHIQUE (Ve-VIIIe S. APRÈS J.-C.)

En 409, les Barbares pénètrent en Espagne : le flux et le reflux des envahisseurs vont la ravager jusqu'à la fin du ve s.

LE CHAMP DE BATAILLLE DES ENVAHISSEURS

https://www.world-lolo.com/images/uploads/image.num1713689399.of.world-lolo.com.jpg


L'Espagne wisigothique


En 412, les Wisigoths, menés par Athaulf, qui épousera Galla Placidia, sœur d'Honorius, entrent dans la Péninsule sous prétexte d'y rétablir l'autorité impériale. Les Vandales Silings sont refoulés en Bétique (qui devient l'Andalousie) ; les Alains sont rejetés en Lusitanie, puis plus au nord, où ils fusionnent avec les Vandales ; les Suèves sont cantonnés en Galice ; mais Honorius installe les Wisigoths en Aquitaine, tandis que les Vandales réoccupent la Bétique et les Baléares, puis, derrière Geiséric, s'emparent de l'Afrique (428-435), et que les Suèves se répandent dans le reste du pays. Après le bref passage de l'empereur Majorien, qui, en 460, tente en vain de détruire la flotte vandale, la Péninsule devient un champ clos entre Suèves et Wisigoths. Euric (466-484) occupe tout le pays, à l'exception de l'extrême Nord-Ouest, où sont refoulés les Suèves (ceux-ci ne seront annexés qu'en 585), et s'en fait reconnaître la possession par l'empereur Zénon (477).

Expulsés par les Francs de la Gaule du Sud (victoire de Clovis à Vouillé, 507), les Wisigoths réduisent leur domination à l'Espagne, sur laquelle ils règnent pendant deux siècles. Le Sud en est même cédé à l'empereur byzantin Justinien en 554 et redevient, pour une cinquantaine d'années, une province romaine.

LE ROYAUME DE TOLÈDE (554-711)
La monarchie wisigothique, qui a établi sa sa capitale à Tolède, assure une relative sécurité à la Péninsule, où, comme ailleurs en Occident, les activités économiques se sont repliées sur la terre. Léovigild (573-586), monarque absolu, réforme l'administration, réorganise la cour et unifie le pays. L'opposition religieuse qui existe entre les Wisigoths, ariens (→ arianisme) depuis le ive siècle, et les Hispano-Romains, catholiques, a interdit longtemps tout mélange des peuples et toute cohésion de l'État.

Cependant, à la suite de la conversion du roi Reccared (587), l'Église catholique acquiert une autorité d'autant plus grande sur la monarchie que l'aristocratie parvient à rendre celle-ci élective. De 633 (élection du roi Sisenand par le quatrième concile de Tolède) à 711 (conquête arabe), dix conciles de Tolède désignent les rois et les contrôlent, établissant une sorte de théocratie conciliaire. Le dynamisme de l'Église espagnole se traduit par une activité théologique et intellectuelle qui tranche avec le reste de l'Occident : en témoigne surtout l'œuvre encyclopédique de saint Isidore de Séville (vers 560-636).

L'ESPAGNE MUSULMANE ET LA RECONQUÊTE (VIIIe-XVe SIÈCLE)
UNE CONQUÊTE MUSULMANE ÉCLAIR
L'Espagne wisigothique s'effondre d'un seul coup en 711 : quelques milliers d'arabo-berbères islamisés, conduits par Tariq ibn Ziyad, franchissent le détroit, qui prend alors le nom de Djabal Tariq - plus tard Gibraltar - et écrasent le roi Rodrigue près de Cadix à la bataille du río Guadalete (19-26 juillet 711). Deux ans plus tard, toute la Péninsule est soumise à Musa ibn Nusayr, gouverneur du Maghreb au nom du calife al-Walid Ier, et forme un émirat au sein du califat. L'expansion musulmane se prolonge au nord des Pyrénées, où elle ne rencontre pas le milieu favorable trouvé en Espagne. Le coup d'arrêt le plus célèbre est donné en 732 à Poitiers, par Charles Martel.

AL-ANDALUS : LE RAYONNEMENT DE CORDOUE
En 756, le prince de la dynastie omeyyade de Damas, détrôné par les abbassides, Abd al-Rahman Ier, cherche asile en Espagne et fonde l'émirat indépendant de Cordoue. Abd al-Rahman III (912-961) prend en 929 le titre de calife. Le califat de Cordoue durera jusqu'à 1031. À cette date, le calife Hicham III est détrôné, et l'Espagne musulmane se fragmente en une vingtaine de royaumes indépendants, les royaumes de taifas (taifa, parti).

Si une forte proportion d'Espagnols embrassent la loi islamique (on les appellera les renégats), si d'autres émigrent vers le Nord, nombre d'entre eux conservent la foi chrétienne, leurs églises et leur clergé, sans être pour autant persécutés.

Les Omeyyades font régner une brillante civilisation sur leurs territoires, et principalement sur l'Andalousie : richesse agricole des plaines irriguées, prospérité urbaine fondée sur le tissage, la céramique, les cuirs de Cordoue, les armes de Tolède, et favorisée par les échanges méditerranéens entre pays islamiques. La grande mosquée de Cordoue, commencée dès 785, est non seulement un centre religieux mais aussi un grand foyer intellectuel et artistique.

https://www.world-lolo.com/images/uploads/image.num1713689500.of.world-lolo.com.jpg


La Reconquête, XIe siècle



Deux contrées espagnoles ont toutefois échappé aux « Maures » du fait de leur isolement et de leur situation périphérique : le Nord-Ouest (Asturies et León) et le Nord au pied des Pyrénées. C'est de ces refuges que part la Reconquista, la Reconquête.

LE MORCELLEMENT DU RESTE DE LA PÉNINSULE
L'expansion des États chrétiens du Nord commence, bien modestement, dès le début du viiie siècle : un royaume des Asturies (plus tard de León) apparaît (première victoire chrétienne [semi-légendaire] de Covadonga, 718), tandis que des îlots d'indépendance s'organisent au sud du León (future Castille) et dans les hautes vallées navarraises et aragonaises. Charlemagne et son fils Louis constituent non sans peine, de 785 à 811, la Marche d'Espagne entre Pyrénées et Èbre (la Catalogne demeurera des siècles sous la suzeraineté au moins nominale du roi de France).

La Navarre s'érige en royaume à partir de 852, et son roi, Sanche III Garcés El Mayor (1000-1035), regroupe tous les royaumes et comtés espagnols sous son autorité (exception faite du comté « franc » de Barcelone). À sa mort, ses États sont partagés entre ses fils.

L'Espagne chrétienne se répartit entre les royaumes de León (au sud duquel apparaît un comté de Portugal), de Castille (royaume en 1035), de Navarre, d'Aragon (royaume en 1035) et le comté de Barcelone, uni à l'Aragon par mariage à partir de 1137. Au hasard des politiques matrimoniales, il arrive que plusieurs de ces États s'unissent temporairement (tels León et Castille de 1037 à 1157).

Longtemps, ces États sont loin de faire figure de puissance. Il est possible que la Navarre et le León aient accepté « la tutelle cordouane aux ixe et xe siècles. Mais en détruisant Saint-Jacques-de-Compostelle (997), al-Mansur a lancé un défi à la chrétienté, et la Reconquête va devenir pour l'Occident chrétien un nouveau front guerrier contre les infidèles.

Cependant, l'Espagne a commencé à prendre forme : création, autour des rois, de conseils qui deviendront les Cortes ; apparition, dès le xe s., des premiers fueros en León et en Castille ; place importante tenue par l'Église et rôle capital des pèlerinages, dont les routes sont les principaux liens entre royaumes ibériques, d'une part, entre ceux-ci et l'Europe chrétienne, d'autre part (Saint-Jacques-de-Compostelle) ; essor de l'art roman, favorisé par ces pèlerinages.