
Deux mois après un procès intense et ultra-médiatisé, le tribunal correctionnel de Paris a rendu son jugement mardi. L'acteur va faire appel, a annoncé son avocat.
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La plus grande figure du cinéma français rattrapée par #Metoo fixée sur son sort. Gérard Depardieu a été reconnu coupable mardi par le tribunal correctionnel de Paris et condamné à 18 mois de prison avec sursis pour agressions sexuelles sur deux femmes lors du tournage d'un film en 2021.
L'acteur français de 76 ans, actuellement en tournage au Portugal, était absent au délibéré. Son avocat, Jérémie Assous, a annoncé qu'il allait faire appel de sa condamnation. Il a vivement critiqué la décision du tribunal, arguant qu'« à partir du moment où vous êtes mis en cause aujourd'hui dans une affaire dite d'agression sexuelle, vous êtes automatiquement condamné et peu importe si on relève de multiples contradictions voire des incohérences ».
« On a passé une nouvelle étape, maintenant la défense même dans ce type de procès n'est plus acceptée », a-t-il déploré. Cette décision est « une négation du droit de la défense », a ajouté Me Jérémie Assous.
Le tribunal correctionnel a en outre prononcé une peine d'inéligibilité de deux ans et son inscription au fichier des auteurs d'infractions sexuelles, conformément aux réquisitions du parquet.
Dans son réquisitoire, à l'issue des quatre jours de procès en mars, la culpabilité de l'acteur aux 250 films ne faisait aucun doute pour le procureur de la République qui a demandé « une peine qui prenne en compte l'absence totale de remise en cause » du prévenu.
« Une victoire pour toutes les femmes. »
« Je suis très émue, je suis très satisfaite de cette décision, c'est pour moi une victoire, un pas en avant, la justice a été rendue, j'ai l'impression », a réagi à la sortie de l'audience, Amélie, 54 ans, l'une des plaignantes.
« C'est une belle décision, c'est une reconnaissance pour les victimes aujourd'hui, pour les victimes de Depardieu », a déclaré Me Carine Durrieu-Diebolt, son avocate. « C'est la victoire de deux femmes mais c'est la victoire de toutes les femmes, derrière ce procès », a-t-elle déclaré, adressant une « pensée pour les autres victimes qui sont déclarées, qui sont prescrites » et les « quatre autres victimes qui sont venues à la barre pour raconter les agressions sexuelles dont elles ont été victimes ».
« J'espère que c'est la fin de l'impunité d'un artiste dans le milieu du cinéma. Avec cette décision, on ne peut plus dire qu'il n'est pas un agresseur sexuel », a continué l'avocate, qui demande au milieu du cinéma d'avoir « des mots pour les victimes » alors que s'ouvre ce mardi le Festival de Cannes.
« On a une pensée pour toutes les victimes de Gérard Depardieu, mais aussi les autres victimes de Gérard Depardieu ou d'autres », a renchéri Me Claude Vincent, l'avocate de Sarah (prénom modifié), la deuxième plaignante. « Il est primordial que tout le monde prenne les choses au sérieux pour toutes les victimes et pour éviter les victimes à venir », a-t-elle ajouté.
« Je conteste les faits. »
Au cours du procès, l'interprète de Cyrano de Bergerac avait fait face aux plaignantes, respectivement décoratrice et assistante réalisatrice sur le film « Les Volets verts » de Jean Becker, qui l'ont accusé d'agressions sexuelles sur le tournage.
Amélie a raconté que le comédien l'a « attrapée avec brutalité » et l'a « bloquée en refermant ses jambes » sur elle. Il lui a ensuite « pétri la taille et le ventre, en remontant jusqu'à [ses] seins », et touché son sexe par-dessus ses vêtements.
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« Je conteste les faits ! », avait vivement réagi l'acteur français devant le tribunal. « Il y a des vices que je ne connais pas », s'était-il exclamé. « Je ne vois pas pourquoi je m'amuserais à peloter une femme, des fesses, des seins, je ne suis pas un frotteur dans le métro », s'était-il défendu. Il a admis pouvoir être « grossier, vulgaire », regrettant « les temps anciens ».
Il a également nié avoir agressé Sarah, 34 ans aujourd'hui. L'assistante sur le film affirme que Depardieu aurait profité d'être seul avec elle pour lui toucher les fesses, avant de lui attraper de nouveau la poitrine et les fesses un peu plus tard, par-dessus ses vêtements.
Multiples attaques pendant le procès.
Pendant leurs plaidoiries, les avocates des parties civiles avaient dénoncé les multiples attaques envers leurs clientes. « Menteuse, hystérique, allez pleurer ! », avait crié Me Jérémie Assous à Amélie et Sarah, s'approchant de leur banc en les pointant du doigt.
« On a assisté pendant quatre jours non pas à une stratégie de la défense, mais à un agresseur défendu par un agresseur », avait regretté Me Claude Vincent, avocate de Sarah. « Ils ont cru qu'avec leurs mademoiselle, ma chérie, en nous traitant d'hystériques, ils allaient nous humilier, mais ce qu'ils ne comprennent pas, c'est que nous sommes fières d'être des femmes », avait-elle souligné.
L'attitude de Me Assous « a été abjecte » a redit Amélie à la sortie de l'audience mardi. « Nous avons vécu quatre jours d'enfer », a-t-elle déclaré.
Ces dernières années, Gérard Depardieu a été accusé d'agressions sexuelles par une vingtaine de femmes mais plusieurs procédures ont été classées pour cause de prescription des faits. La comédienne française Charlotte Arnould, présente dans la salle lors du procès, a porté plainte pour viol en 2018. Le parquet de Paris a requis un procès à l'encontre de l'acteur.