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El Roslino
Quand la passion devient un luxe
Vous avez déjà vu la tête d'un gamin de 20 ans quand il apprend qu'il va falloir sortir 1500 balles (coût moyen du permis A2 en 2025) pour avoir le droit de caler entre deux cônes en plastique ? Moi oui. Et pas qu'une fois. À chaque fois, je me dis la même chose : “C'est plus un permis, c'est un ticket d'entrée pour une secte.”
Parce qu'il faut le dire une bonne fois pour toutes : le permis moto, aujourd'hui, c'est plus un test de finances que de passion. Et dans un monde où chaque centime compte, ça commence à faire le tri. Le vrai. Pas celui des fiches et du demi-tour sur 6 mètres.
Le prix de la liberté (au tarif premium)
Commençons par l'évidence qui fâche : le tarif. Inscription, code, plateau, circulation, heures supplémentaires “conseillées”, location du matos, frais de dossier... Ajoutez un gilet fluo, deux cafés tièdes à la pause et vous voilà à 1700 euros. Pour espérer rouler. Pas pour une bécane, hein, juste pour le droit d'enfourcher une 500 bridée.
À ce prix-là, y'a 20 ans, je repartais avec une CB500, un casque moyenâgeux et un plein d'essence. Aujourd'hui, tu repars avec une facture et un doute existentiel.
Et pourtant, on continue. Parce que cette passion, elle ne s'achète pas, elle se vit. Même à crédit.
L'initiation, version 3.0 : cônes, stress et paperasse
Le permis moto, c'était censé être un rite. Un passage. Une bascule entre “j'aimerais bien rouler” et “je suis un motard”. On le vivait comme une aventure, une école de la route, avec ses sueurs, ses échecs et cette première balade au guidon de ta bécane.
Aujourd'hui ? C'est devenu une épreuve de logique administrative. On passe plus de temps à mémoriser des parcours de plateau dessinés par un prof de géométrie sadique qu'à apprendre à anticiper un automobiliste lunatique en ville. Le stress n'est plus dans la circulation, il est dans le chrono, le plot, la fiche.
On en oublie presque pourquoi on est là. Pour rouler. Pour vibrer. Pour vivre un peu plus fort que dans un bus à l'arrêt.
Un sport de riches ? Ou un test de foi ?
Certains diront que c'est un filtre naturel. Que si t'as pas les moyens, t'avais qu'à bosser plus. Qu'un “vrai motard”, il trouve toujours un moyen. Mais soyons honnêtes : ce filtre-là n'a plus rien de naturel. Il est social. Violent. Et un peu hypocrite aussi.
Parce que celui qui rêve de rouler mais qui bosse au SMIC, il fait quoi ? Il attend d'avoir 40 ans, une situation stable et une bagnole hybride ? Ou il laisse tomber et se dit que la moto, c'était pas pour lui ? Et pendant ce temps, les salles de code pour trottinette, ça n'existe pas. Pourtant, elles envoient du monde aux urgences, elles aussi.
Alors oui, c'est bien de former, de sécuriser, d'encadrer. Mais si c'est pour que seuls ceux qui ont les moyens roulent, on a perdu le sens. Et la route.
Deux ou quatre roues ? On vous aide à choisir
Dans le genre parcours du combattant, tout est fait pour que le jeune s'arrête au permis B. Avant, le code de la route était commun, valable cinq ans. Tu pouvais grappiller, empiler les tampons sur ton papier rose comme on collectionne des vignettes Panini. Aujourd'hui, il faut passer un code spécifique deux-roues. On me dira que ça remplace les fiches à réciter au plateau, mais ces fiches-là, elles étaient gratuites et tu pouvais les potasser sur une feuille froissée dans le métro.
La sélection avait déjà commencé à 14 ans, quand on a dit aux gamins qu'ils pouvaient conduire une boîte en plastique à quatre roues sans permis et sans code, juste avec le BSR. Puis à 17 ans, avec un permis B accessible un an avant le A2. Tu veux une comparaison qui pique ? À 17 ans, tu peux prendre le volant d'une Ferrari, mais il faudra attendre deux ans et une formation payante de sept heures pour enfourcher une 125 bridée à 15 chevaux. Une mobylette de luxe, en somme.
On veut des jeunes, mais on les empêche de venir
Le paradoxe est beau. On se plaint que les jeunes ne s'intéressent plus à la moto. Qu'ils ne jurent que par Netflix, TikTok et les livraisons à trottinette. Mais on oublie de leur dire que pour découvrir le plaisir d'un virage bien pris, il faut d'abord qu'ils hypothèquent leur console.
C'est un peu comme si on interdisait l'accès à la bibliothèque, puis qu'on se plaignait que plus personne ne lit.
Et pourtant, on en croise encore, des jeunes passionnés. Qui grattent, qui économisent, qui s'inscrivent au permis comme d'autres préparent le bac. Mais combien abandonnent en cours de route ? Combien renoncent, la mort dans l'âme, parce que c'est juste trop cher ?
Conclusion (non homologuée)
Je ne demande pas la gratuité. Je ne demande pas qu'on file des permis comme des codes promo. Je demande juste qu'on redonne du sens. Qu'on arrête de confondre sécurité et complexité. Qu'on forme vraiment, plutôt que de décourager à coups de PV et de parcours du combattant.
Parce que la moto, c'est pas un luxe. C'est une passion. Une culture. Un mode de vie. Et tant qu'on continuera à filtrer par le portefeuille, on passera à côté d'une génération entière.
Alors voilà. Si un jour un décideur monte sur une 125, les mains moites et le cœur battant, qu'il comprenne ça : ce n'est pas juste un permis. C'est un rêve qui commence. Et ça, ça mérite mieux qu'un devis à quatre chiffres.