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El Roslino
La marine chinoise aligne davantage de navires de combat que la puissante marine américaine. Ce n'est pas une nouveauté : la PLAN surpasse numériquement l'US Navy depuis 2015. Mais les derniers chiffres ont de quoi faire tanguer !
Le centre de recherche du Congrès américain (le CRS) a publié le 9 mars la version révisée de son étude sur les capacités navales de l'armée populaire chinoise. Cette étude intitulée « China Naval Modernization : Implications for U.S. Navy Capabilities - Background and Issues for Congress » en est à sa 249e version !
L'inexorable renforcement naval de la Chine.
Ce rythme effréné de mise à jour s'explique facilement : la PLAN (la marine chinoise) construit et met en service de si nombreux bâtiments chaque année qu'il faut régulièrement réviser les chiffres. Les tableaux du CRS démontrent donc, année après année, révision après révision, l'inexorable renforcement naval de la Chine.
Il apparaît que la bascule est intervenue en 2014/2015 quand le nombre d'unités chinoises a dépassé celui de l'US Navy. Actuellement, la PLAN disposerait de 333 unités selon le CRS. L'ONI ( US Office of Naval Intelligence ) avance le chiffre de 360 et prédit que la PLAN alignera 400 bâtiments d'ici à 2025.
Et pour enfoncer le clou, ajoutons à cette armada chinoise les moyens des garde-côtes (255 bâtiments selon le CRS) dont certains bâtiments ont tout de navires de combat repeints en blanc. Et si l'on ajoute la milice navale », ce seraient quelque 700 bâtiments qui seraient disponibles.
La flotte amphibie chinoise est démesurée. Sauf si l'invasion de Taïwan est sur les cartes.
Selon l'ONI, l'US Navy alignait quand même de son côté 297 bâtiments fin 2020 (296 selon le CRS et 298 selon le site américain military.com qui détaille : 11 porte-avions, 115 navires de combat de surface, 68 sous-marins, 33 navires amphibies, 8 navires pour la guerre des mines, 30 navires de ravitaillement, 32 bâtiments de soutien et 1 navire auxiliaire.
Un porte-avions américain et l'un de ses navires d'escorte. | US NAVY
Toutes ces données font bien référence au nombre d'unités, et pas à celui du tonnage ou à la qualité des bâtiments et armements chinois.
S'il faut soulever la question de la qualité, évitons les poncifs qui sous-estiment la qualité des matériels chinois. Andrew S. Erickson, professeur à l'US Naval War College et auteur des livres Chinese Naval Shipbuilding : An Ambitious and Uncertain Course et The Chinese Naval Shipbuilding Bookshelf estime que la marine chinoise ne reçoit pas de la camelote des chantiers navals mais plutôt des navires de plus en plus sophistiqués. Ainsi, les destroyers chinois de type 055, dont 2 des 8 unités commandées sont en service, n'ont rien à envier aux puissants destroyers lance-missiles américains de la classe Arleigh Burke.
Pourquoi une telle armada ?
Au-delà des comparaisons (on pourrait aussi comparer le tonnage des deux flottes, les effectifs des deux marines, le nombre d'appareils de leur aéronavale, etc.), se pose quand même la question du pourquoi ?
La question a été posée par CNN dans une excellente étude du 6 mars, titrée : « China has built the world's largest navy. Now what's Beijing going to do with it ? ». Une étude où l'on peut lire la phrase suivante : La Chine a construit en une année de temps de paix (2019), plus de bâtiments que les USA en quatre ans de guerre (1941-1945).
Certes, la Chine a une longue façade maritime à défendre mais ses capacités vont désormais largement au-delà de la simple protection côtière. Deux porte-avions, une cinquantaine de frégates de premier rang, une soixantaine de navires amphibies dont les nouveaux BPC de type 075... Qu'est-ce que Pékin va faire de tout ça ?
Premier élément de réponse : la PLAN a besoin d'un arsenal puissant et diversifié dans le cadre de son concept de « Near Seas Defense and Far Seas Protection ». Ce concept chinois date de 2015 et associe deux dimensions, l'une régionale avec la défense de la souveraineté chinoise, l'autre hauturière avec une extension géographique et stratégique incluant des projections de puissance.
Effectivement, la flotte de haute mer chinoise est désormais en mesure de déployer des groupes aéronavals dans l'océan Indien (les Chinois ont déployé 36 flottilles de lutte antipiraterie dans le golfe d'Aden depuis 2008), dans le Pacifique, et pourquoi pas dans l'Arctique et l'Atlantique ? Ces déploiements hauturiers pourraient se faire dans le cadre de projections de puissance ou en soutien à des forces expéditionnaires chinoises (qui seraient par exemple sous mandat onusien, dans le cadre d'opérations de maintien de la paix).
Des frégates chinoises en mer de Chine. La marine chinoise sait se projeter sur toutes les mers du globe.
D'autres réponses sont plus pragmatiques et plus inquiétantes car elles intègrent l'hypothèse d'une confrontation armée. L'amiral Davidson, le patron du United States Indo-Pacific Command, abonde en ce sens en parlant de l'île américaine de Guam qui abrite d'énormes moyens navals et aéronavals : Pour moi, il est clair que Guam n'est plus l'endroit à partir duquel on pouvait lancer des opérations, comme on l'a pensé pendant des décennies. On va devoir désormais se battre pour Guam, de façon à pouvoir opérer encore à partir de là.
D'autres analystes estiment que la seule cible reste Taïwan et que l'effort chinois vise la reconquête de l'île rebelle et simultanément un affrontement direct avec les marines des pays occidentaux qui pourraient venir au secours de l'île, que Pékin juge comme une part inaliénable de son territoire. D'où ce double socle naval, à la fois expéditionnaire pour la haute mer et amphibie pour le combat littoral et l'invasion d'un territoire terrestre par la mer.
PLAN versus US Navy.
Qui l'emporterait ? Difficile d'apporter une réponse définitive. Pour beaucoup de militaires et d'analystes, un affrontement entre la PLAN et l'US Navy serait bref et violent, meurtrier et dévastateur...
Protéger Taïwan, voire les Philippines et le Japon lors d'un conflit de haute intensité contre la Chine, coûterait cher à l'US Navy, mais aussi à la marine chinoise. La PLAN, en effet, n'a certainement pas l'expérience de l'US Navy en matière d'opérations. En outre, elle aurait du mal à, simultanément, assurer un assaut amphibie dans le cadre de sa Near Seas Defense, mener à bien une projection en haute mer pour interdire l'approche d'une flotte US, et protéger ses LoC, ses voies de communication et d'approvisionnement, dans le cadre d'une Far Seas Protection.
La question majeure, c'est en réalité celle du prix humain que les USA sont prêts à payer. En cas de conflit avec la Chine, ce prix serait élevé, clairement. Perdre un porte-avions et ses 6 000 marins et aviateurs, c'est autre chose que perdre un hélicoptère Blackhawk (comme en Somalie, en 1993, avec les conséquences que l'ont sait).
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