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STUPEFIANTS Alors que la prohibition montre ses limites, le chef de l'Etat estime, à un an de la présidentielle, qu'il faut « aller encore plus loin » pour lutter contre le cannabis .
Dans une interview accordée ce lundi au Figaro, le chef de l'Etat souligne la nécessité d'« éradiquer par tous les moyens » les trafics de stupéfiants, afin de « faire reculer la délinquance partout ».
Alors que la législation française est déjà l'une des plus répressives, le président estime qu'il faut « aller encore plus loin, provoquer une prise de conscience ».
Une prise de position très politique déplorée par des élus de tous bords.
A l'époque, Emmanuel Macron n'était « pas contre ». En septembre 2016, quelques jours après avoir quitté Bercy, celui qui n'était pas encore candidat à la présidentielle n'était pas fermé à l'idée de légaliser le cannabis en France. Une mesure, reconnaissait-il, qui présente une « forme d'efficacité » pour lutter notamment contre « la délinquance dans les quartiers difficiles ». Elu président de la République en 2017, Emmanuel Macron semble avoir radicalement changé d'avis sur la question. Dans une longue interview accordée au Figaro ce lundi, il souligne la nécessité d'« éradiquer par tous les moyens » les trafics de stupéfiants, afin de « faire reculer la délinquance partout ».
Accusé par la droite de ne pas en faire assez sur les questions de sécurité, le chef de l'Etat durcit le ton en vue de 2022 et vante le bilan des actions lancées par le gouvernement pour lutter contre une consommation de cannabis qui explose. « 70.000 amendes forfaitaires délictuelles ont été dressées depuis septembre dernier », salue-t-il, et « plus de 1.000 opérations "coup de poing" ont été réalisées ces dernières semaines » contre les points de deal répertoriés par le ministère de l'Intérieur. Pour Aurélien Taché, député ex-LREM du Val-d'Oise, ces déclarations montrent surtout qu'Emmanuel Macron « s'est définitivement rangé dans le camp des conservateurs et ouvre maintenant sa campagne [pour 2022] à droite toute ».
Emmanuel Macron « recommence les erreurs faites depuis trente ans ».
Il faut dire que le président prend le contre-pied d'autres pays, comme les Etats-Unis ou le Canada, qui ont assoupli leur législation ces dernières années. Alors que la France réprimande sévèrement la consommation et les trafics de drogue, Emmanuel Macron estime qu'il faut « aller encore plus loin, provoquer une prise de conscience ». Pour le député LFI de la Seine-Saint-Denis Eric Coquerel, Emmanuel Macron « recommence les erreurs faites depuis trente ans ». Malgré la répression, rappelle l'élu dans un communiqué, la France est « championne d'Europe de la consommation d'un cannabis toujours plus toxique ». « Et le trafic ne cesse de progresser. » Après les opérations de police des derniers jours, les points de deal « se sont juste déplacés ou, au mieux, ont été interrompus provisoirement », remarque-t-il.
Si le ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin, est passé maître dans l'art de la mise en scène de la saisie de stupéfiants, les chiffres des saisies illustrent pourtant les limites des opérations de police pour faire tomber les trafics. Selon nos informations, 96,5 t de résine et d'herbe de cannabis ont été saisies en 2020 par la police, la gendarmerie et les douanes. Une paille, comparée au 360 t de cannabis importées chaque année en France. En privé, les policiers ne le cachent pas, ils ont « l'impression d'essayer de vider la mer à la petite cuillère ».
Chaque année, pourtant, l'État dépense 568 millions d'euros pour lutter contre le cannabis, dont 70 % consacrés aux actions des forces de l'ordre et 20 % aux services judiciaires et pénitentiaires, indiquait en 2019 une note du Conseil d'analyse économique (CAE) qui pointait l'« échec » de la répression. Pour ce groupement d'économistes rattaché à Matignon, légaliser le cannabis permettrait de créer entre 27.500 et 80.000 emplois et de générer des recettes fiscales de 2 à 2,8 milliards d'euros. « Si vous légalisez le cannabis, vous financez l'Etat qui aurait bien besoin de ces recettes pour rénover les hôpitaux, investir dans ces quartiers pour qu'il y ait un peu moins de difficultés, ou aider les étudiants », assure également Aurélien Taché à 20 Minutes.
« L'un des meilleurs moyens pour lutter contre les dangers » du cannabis.
A l'Assemblée nationale, une mission d'information s'est d'ailleurs penchée sur la question de la légalisation du cannabis et a auditionné des dizaines d'experts. Un rapport doit être présenté début mai. Rapporteuse thématique de la mission, la députée LREM du Loiret Caroline Janvier espère que la publication de ce document permettra « peut-être de faire changer d'avis Emmanuel Macron », qui a également annoncé dans Le Figaro « la tenue d'un grand débat sur ce sujet ». « A partir du moment où l'on ouvre un débat sur un sujet, cela veut dire que l'on est prêt à entendre des arguments de différents côtés », explique-t-elle à 20 Minutes.
« Cela peut être l'occasion, pour les gens qui considèrent que la légalisation équivaut à la banalisation ou à la promotion du cannabis, de changer d'avis et de constater que c'est l'un des meilleurs moyens pour lutter contre les dangers intrinsèques du cannabis, et ceux créés par la prohibition et son interdiction », poursuit-elle. De son côté, Aurélien Taché ne croit « absolument pas que ce débat puisse déboucher sur quelque chose qui viserait à aller dans le sens de la légalisation ». Selon lui, « Emmanuel Macron a décidé de complètement abandonner le progressisme ».
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