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El Roslino
Nagacorp, véritable empire du jeu au Cambodge, en croissance depuis vingt-cinq ans, vient seulement d'essuyer son premier revers. Son projet de parc d'attractions près des temples d'Angkor a été retoqué.
Piscine à vagues, toboggans, marché chinois flottant créé de toutes pièces et palace de 900 chambres... Les bouddhas aux sourires apaisés du temple Bayon et des bas-reliefs d'Angkor Wat au Cambodge - le plus grand monument religieux au monde -, classés au patrimoine mondial de l'Unesco, viennent d'échapper, de justesse, à l'« Angkor Lake of Wonder ».
Le gouvernement cambodgien, qui encourage depuis vingt-cinq ans la croissance ininterrompue de Nagacorp, un géant du casino, a fini par mettre son veto à son dernier projet.
Rendus publics en novembre 2020, les plans de ce parc d'attractions de 75 hectares, qui aurait été construit à 500 m de la zone protégée d'Angkor, avaient déjà suscité l'indignation des milieux culturels, mais il aura fallu attendre une nouvelle médiatisation internationale du projet, en février, pour que le pouvoir cambodgien recule.
Le ministère de la Culture et des Beaux-Arts cambodgien a annoncé « partager l'avis [défavorable] des experts du CIC-Angkor », structure internationale qui veille à la sauvegarde du parc archéologique. Les activités se trouvant à proximité « doivent éviter tout effet négatif qui puisse nuire à la valeur universelle du site », a ajouté le porte-parole du ministère cambodgien, Sum Map.
Pour le géant Nagacorp, ce rejet a un parfum de camouflet, car le groupe qui s'est taillé la part du lion dans l'économie du jeu au Cambodge se croyait, jusque-là, tout puissant.
Dans la capitale Phnom Penh, ses deux établissements Nagaworld, nommés en hommage à la divinité bouddhiste du Naga, allient casinos, restaurants et offrent plus de 1 600 chambres d'hôtel aux clients fortunés. Côté jeux d'argent, les 1 926 machines électroniques et 512 tables de jeu ont enregistré 1,7 milliard de dollars de paris en 2019.
Le tout pour un résultat net de plus de 500 millions de dollars, en hausse constante depuis plusieurs années. « Nagaworld reste loin derrière certains titans de Macao... Mais selon nos estimations, il est tout de même le 12e plus grand casino au monde en termes de montants pariés », relève Warwick Bartlett, expert de l'industrie du jeu basé au Royaume-Uni.
Ces excellents résultats bénéficient d'une situation de monopole très avantageuse : un accord avec le gouvernement cambodgien garantit au casino une zone d'exclusivité de 200 km autour de Phnom Penh jusqu'en 2045, dans l'une des régions les plus dynamiques au monde. « La proximité avec la Chine explique en partie le succès de Nagaworld, juge Warwick Barlett. C'est un moteur économique pour l'ensemble de la région et les Chinois adorent les jeux d'argent. »
À la tête de ce géant du jeu coté à la Bourse de Hong Kong, règne Chen Lip Keong, un Malais d'origine chinoise de 73 ans établi de longue date dans le royaume khmer. En octobre 2020, ce père de trois enfants, diplômé de médecine, a d'ailleurs obtenu la nationalité cambodgienne, devenant de fait le premier milliardaire cambodgien. Selon le magazine Forbes, sa fortune s'établit à quelque 5,4 milliards de dollars.
Malgré le revers à Angkor, l'avenir de Nagacorp est loin d'être menacé. À Phnom Penh, le groupe investit actuellement 3,5 milliards de dollars pour la construction d'un troisième établissement Nagaworld, à côté des deux précédents. Bâti sur les ruines du « White Building », un bâtiment iconique de l'architecture khmère des années 1960, le projet prévoit notamment une tour de soixante étages, la plus haute du Cambodge.
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