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El Roslino
Le réalisateur Joachim Rønning décrypte l'étonnant phénomène de cette saga d'anticipation, qui reste aussi singulière qu'avant-gardiste, quarante ans après sa création.
Les fans de Tron ont de quoi se réjouir. Après quinze ans d'attente, Disney offre enfin une suite à cette franchise de science-fiction atypique qui a des allures de comète de Halley. Surgi en 1982, le film originel signé Steven Lisberger faisait déjà figure d'ovni. Plonger des humains concepteurs de jeux vidéo dans les entrailles d'un cyber-univers bien avant l'avènement du virtuel et d'internet tenait d'une forme d'avant-gardisme.
Quarante-trois ans plus tard, Tron Ares (fort de ses 200 millions de dollars de budget) revient titiller les méninges de la génération Z, tout en poussant un peu plus loin son ADN visionnaire, ses effets numériques 3D, et sa philosophie pionnière... Sans oublier de rendre hommage aux mélodies hypnotiques de Daft Punk grâce au puissant son rock metal industriel du groupe Nine Inch Nails d'Atticus Ross et Trent Reznor. De passage à Paris, le réalisateur de Tron Ares, le Norvégien Joachim Rønning (Pirate des Caraïbes 5, Bandidas) décrypte avec finesse et profondeur le phénomène.
Joachim RONNING - Je ne l'ai pas vu à sa sortie car j'étais encore trop jeune. Mais je me souviens que j'étais fasciné par les visuels du film. Je pense que j'ai été impressionné par les posters que je voyais affichés chez mes amis. J'ai fini par voir les deux films, celui de 1982 et celui de 2010. Je trouve que ce sont deux chefs-d'œuvre. Lorsque Disney m'a proposé de diriger le troisième volet, j'ai senti s'installer en moi une forte pression, car les deux premiers longs-métrages étaient ambitieux et très en avance sur leur temps.
En quoi la franchise Tron est-elle si singulière ?
Elle s'étend déjà sur plusieurs décennies : 43 ans pour être exact. Le premier film était visionnaire, avant-gardiste. Il a marqué son temps. À l'époque, l'industrie des jeux vidéo triomphait. L'informatique commençait à envisager les potentialités de ce qui allait plus tard s'appeler Internet et les réseaux sociaux. Steven Lisberger a eu l'idée géniale de plonger ses personnages au cœur des jeux vidéo, dans ce qu'il a appelé la Grille. Lorsque Joseph Kosinski a mis en scène le deuxième chapitre en 2010, le Web était déjà là. Mais le concept de Tron - l'héritage se centrait cette fois sur un univers en 3D et les dangers de la perfection.
Quel est le thème central de ce troisième volet ?
Dans les deux premiers films, le héros, Kevin Flynn, traversait le miroir comme le Alice au pays des merveilles. Cette fois, c'est l'inverse : le virtuel surgit dans notre réalité. Les programmes vont s'humaniser à leurs risques et périls. D'un point de vue spectaculaire, ça a été un vrai défi. Je me souviens qu'à la trentième page du script de Tron Ares, quand j'ai découvert que la moto Light Cycle débarquait dans le monde réel, je me suis immédiatement dit : « Où dois-je signer ? Je veux faire ce film ! » C'était très excitant d'envisager le film sous cet angle, avec cette nouvelle perspective.
A-t-il été question dès le début du projet de mettre en scène une I.A. nommée Ares ?
Non. Lorsque je suis arrivé à bord, il y a trois ans, l'IA n'était pas vraiment inscrite sur notre agenda. Maintenant, avec ChatGPT et les autres applications similaires, c'est devenu une technologie de tous les jours. Tout le monde l'utilise. Tout au long de la production, le script a évolué. En tant que réalisateur, il s'est agi avant tout pour moi de mettre en scène des personnages. Je me suis appliqué à raconter le long et sinueux voyage entrepris par Ares. Sans perdre de vue l'aspect émotionnel de cette quête. La seule petite critique que je pourrais faire aux précédents volets, c'est qu'ils ne se préoccupaient pas vraiment d'injecter de l'émotion dans l'intrigue. Avec Tron Ares, j'ai essayé de trouver un équilibre entre les prouesses technologiques et l'émotion des protagonistes.
Depuis de nombreuses années, l'IA est le grand méchant des films d'anticipation, de Terminator au dernier Mission : Impossible . Comment l'avez-vous traité dans Tron Ares ?
Nous avons choisi d'aller à contre-courant de toutes les idées reçues à Hollywood actuellement. Le personnage d'Ares incarné par Jared Leto est avant tout un programme guerrier. Mais il porte en lui une dualité intéressante. Il est capable d'évoluer par lui-même. Une sorte de Prométhée numérique. Son voyage initiatique en deviendra d'autant plus passionnant.
Comment avez-vous convaincu Jeff Bridges de faire à nouveau partie de l'aventure?
Pour lui, participer à ce troisième film, à l'âge de 75 ans, c'est comme effectuer un grand voyage temporel. Il avait une trentaine d'années lorsqu'il a incarné Kevin Flynn pour la première fois. J'ai bien senti qu'il aurait été très difficile de tourner un troisième film sans lui.
Comment s'est déroulé le tournage avec lui?
Quand Jeff arrive sur le plateau, il est très décontracté. Il sait mettre tout le monde à l'aise. Il est très charismatique, en impose sans rien faire, juste par sa présence. Nous n'avons eu qu'une semaine de tournage avec lui, mais elle a été inoubliable.
Avez-vous eu recours aux conseils de Steven Lisberger?
Steven Lisberger est un vieux sage, un esprit libre. Il a été un formidable collaborateur. Il a été comme notre Obi-Wan Kenobi. Dès que nous butions sur un problème, il trouvait une solution. C'est lui, par exemple, qui a eu l'idée d'inclure une énergie féminine dans le film, sachant que le premier scénario était conduit par une vigueur un peu trop masculine.
En quoi ce troisième film est-il toujours en avance sur son temps?
Même s'il suit sa propre logique, Tron Ares tire sa substantifique moelle des deux précédents films. Le film a été conçu avec les dernières innovations en matière d'effets spéciaux. Il y a plus de 2 100 plans d'effets visuels sur ce long-métrage. Les motos Light Cycles ont été construites en vrai, en s'appuyant sur des châssis d'Harley Davidson. Honnêtement, j'ai voulu honorer l'univers de Tron et le prendre dans sa progression naturelle. Mais j'ai bien intégré le fait que Disney se sert des films Tron comme d'une sorte de vitrine technologique de ce qu'il est possible de faire.
De quelle manière l'acteur Jared Leto s'est-il impliqué dans ce troisième volet ?
Jared Leto est un grand fan de science-fiction et de l'univers de Tron. Depuis une petite dizaine d'années, il n'a cessé de lutter pour que ce troisième film puisse voir le jour. C'est lui qui m'a engagé, en fait. Il n'y aurait pas eu un troisième film sans lui.
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