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El Roslino
Yves Crozet, professeur a science po ( Lyon ).
Le gouvernement français a annoncé vendredi 7 milliards d'euros de prêt à Air France KLM qui subit la quasi-paralysie du trafic aérien. Décryptage avec Yves Crozet, économiste des transports.
Pourquoi procéder à des prêts plutôt qu'à une nationalisation ?
La montée au capital était en effet parmi les options. Une nationalisation en pratique. Mais Air France-KLM, c'est aussi le hollandais KLM. Or, les Pays-Bas n'ont pas du tout la même culture des nationalisations. L'option a donc été évacuée. Le gouvernement sait par ailleurs qu'Air France sera dans les temps qui viennent une machine à faire des pertes et il ne veut pas se retrouver avec une deuxième SNCF sur les bras.
Le monde d'avant, c'était de plus en plus en plus de passagers, ce qui permettait d'être rentable avec de bons taux de remplissage des avions. Le monde d'après, ce sera moins d'avions avec moins de passagers dans chacun d'entre eux. Donc, il faudra augmenter le prix des billets, ce qui chassera la clientèle. Air France sera vraiment une machine à perdre de l'argent. Si cette situation se prolonge pendant quatre ou cinq ans, les prêts de l'État devront peut-être être transformés en actions.
Ben Smith pense pouvoir tenir deux ans avec cet argent...
Peut-être, mais certains experts parlent d'un retour à la normale en 2023. La clientèle des voyages d'affaires diminuait déjà ces dernières années grâce à la pratique des visioconférences. La grosse clientèle, ce sont les touristes, mais ils vont revenir doucement. Les retraités, qui ont du pouvoir d'achat, sont plus exposés au Covid-19, donc ils vont peut-être changer leurs lieux de vacances.
Que permettront 10 milliards ?
Air France-KLM perd 25 millions d'euros par jour pendant le confinement, 600 à 700 millions par mois. On voit que l'aide de la France ne permet de tenir que dix mois à ce régime. Le groupe aura probablement 100 à 200 millions d'euros de pertes mensuelles pendant très longtemps.
Quelles conséquences sociales ?
Air France va faire des plans de départs volontaires, se débarrasser de certains avions et retarder les livraisons prévues. Derrière Air France, il y a Airbus qui va aussi être touché par un jeu de dominos.
Cela va-t-il changer la donne du dialogue social ?
La position du PDG, c'est de dire qu'à présent, tout le monde va devoir se serrer la ceinture. Il veut normaliser le cadre social. Les pilotes sont peut-être prêts à évoluer, mais le contexte politique risque d'interférer : puisque l'État ouvre les vannes de ses finances pour les hôteliers et restaurateurs, d'autres catégories comme les salariés de l'aérien seront peut-être tentés de demander eux aussi des aides.
L'État va exiger la réduction des émissions de CO2...
Contrairement à une idée reçue, le transport aérien est déjà très vertueux. Alors que le nombre de passagers a augmenté de 60 % depuis 2000, la consommation de kérosène n'a progressé que de 10 %. À l'avenir, il faudra sans doute utiliser du biofioul, mais les avions auront toujours besoin de carburant liquide. Dire qu'on va supprimer les navettes Paris-Lyon ou Bordeaux-Paris, ça n'a pas de sens. Les voyageurs leur préfèrent déjà le TGV, sauf quand il y a correspondance avec un autre vol.
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