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Message 1 Discussion postée le 24-09-2020 à 15:19:49

El Roslino
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Jack l'éventreur

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Le crime sans visage.

À l'automne 1888, l'assassinat de prostituées dans le quartier londonien de l'East End sème la terreur. La spécialité du meurtrier : éviscérer ses victimes. Le mythe de Jack l'Éventreur prend forme et réveille les démons tapis sous le vernis de la pudibonde société victorienne.

Londres est à la fin du xixe siècle la plus grande ville du monde occidental. Capitale d'un empire sur lequel le soleil ne se couche jamais, elle incarne la toute puissance d'une Grande-Bretagne dont l'économie et la diplomatie dominent alors la planète. La reine Victoria, montée sur le trône en 1837, devenue en 1876 impératrice des Indes, est le symbole vivant de cette suprématie, que rien ne semble pouvoir entamer.

C'est pourtant là, dans le quartier populaire de l'East End, près de Whitechapel, qu'une série de crimes atroces commis en 1888 contre des prostituées va tout d'un coup lever le voile sur l'envers obscur de la société britannique.

Tout commence à la fin de l'été, le 31 août 1888, lorsque l'on retrouve à Buck's Row, une ruelle sombre de ce quartier ouvrier, le cadavre de Mary Ann Nichols, dite Polly. Cette femme de 43 ans, que la misère avait poussée à la prostitution, a été étranglée, puis on lui a tranché la gorge, entaillé l'abdomen et lacéré les organes génitaux. Une semaine plus tard, le 8 septembre, dans une arrière-cour du quartier voisin de Spitalfields, on découvre le corps sans vie d'Annie Chapman : elle a aussi été égorgée et éviscérée. De surcroît, le vagin, l'utérus et la vessie ont été prélevés par le meurtrier. À la fin du mois de septembre, deux autres victimes sont identifiées, prostituées occasionnelles elles aussi, Elizabeth Stride et Catherine Eddowes. Cette dernière a été atrocement mutilée : des organes ont été retirés du ventre ouvert et déposés près du visage balafré ; un rein a également été sectionné et subtilisé par le meurtrier.

Quartier populaire, gangrené par la misère et l'alcoolisme, fréquemment englouti par le fog, le brouillard londonien, l'East End n'en était certes pas à ses premiers crimes. Mais ces meurtres sordides soulèvent l'indignation et suscitent une vive inquiétude dans toute la capitale britannique. L'absence de vol, la façon dont les corps des victimes ont été découpés et meurtris, tout laisse présager l'existence d'un seul et même assassin, aux motivations plus que perverses. Mais en l'absence de traces ou de témoignages, la police est totalement désemparée. Pourtant, quelques jours avant les meurtres d'Elizabeth et de Catherine, une lettre était parvenue à la Centrale de presse britannique et avait été transmise aux enquêteurs de Scotland Yard. Elle revendiquait les deux premiers assassinats et en annonçait d'autres. Écrite à l'encre rouge, elle était signée « Jack the Ripper », « Jack l'Éventreur ».

L'affaire se transforme dès lors en véritable « panique morale ». La presse populaire, qui prospère depuis le milieu du xixe siècle, connaît le potentiel des faits divers. Elle exploite donc sans état d'âme cette série de crimes « sensationnels ».

The Star, un journal du soir fondé la même année, voit ses ventes passer de 20 000 à 200 000 exemplaires quotidiens, tandis que The Illustrated Police News, le premier des magazines exclusivement consacrés aux affaires criminelles, propose à ses lecteurs un résumé hebdomadaire et en images de l'enquête en cours. Mais tous les quotidiens, du Manchester Guardian au London Daily News et au Daily Telegraph, en passant par le vénérable Times, y vont de leurs manchettes. Le retentissement dépasse aussi très vite les frontières du pays.

Surtout, non contents d'en rajouter sur l'abomination des meurtres, de nombreux reporters soufflent sur les braises en critiquant une police que l'on dit incapable de protéger les Londoniens.

L'enquête, il est vrai, peine à progresser. Elle est d'abord confiée au détective Edmund Reid, responsable de la police municipale de Whitechapel. Mais il est vite secondé par des enquêteurs du Central Office de Scotland Yard, dirigés par Frederick Abberline, puis par Charles Warren. Durant les mois de septembre et d'octobre 1888, les policiers sillonnent les bouges et les asiles de nuit de l'East End, distribuent des milliers de prospectus et d'appels à témoignage, usent de limiers et de chiens. Ils interrogent au total près de 2 000 personnes, examinent les faits et gestes de plus de 300 d'entre elles, dont 76 bouchers, équarrisseurs et professions similaires.

Plus de 80 suspects sont arrêtés, parmi lesquels figure John Pizer, un cordonnier juif de Whitechapel surnommé « Leather Apron » (« Tablier de cuir »), immigré polonais soupçonné par le quartier. Mais ni lui ni aucune des autres personnes appréhendées ne correspondent au meurtrier que, faute de témoignage fiable, il est impossible d'identifier.

Les juifs désignés à la vindicte.

À Whitechapel, des habitants apeurés se regroupent dans un Comité de vigilance dirigé par George Lusk, un entrepreneur en bâtiment que les commerçants du quartier ont élu président. Le comité, qui organise des patrouilles de nuit, ne se prive pas de désigner d'éventuels coupables à la vindicte publique, ouvrant ainsi la chasse au bouc émissaire.

Beaucoup pensent que de telles horreurs ne peuvent avoir été commises par un Anglais. On dénonce donc rapidement les immigrés qui vivent dans ce quartier pauvre. Les plus nombreux sont les juifs, 80 000 environ, qui ont fui les pogroms de Pologne et de Russie, et s'efforcent de survivre dans les taudis de l'East End. Ce sont eux que l'on accuse d'emblée.

« Les juifs sont ceux que l'on ne condamnera pas à tort », dénonce un graffiti inscrit sur un mur de Goulton Street, non loin des rues où l'on a découvert les cadavres. La police, craignant une émeute ou des débordements dans ce quartier où l'antisémitisme est virulent, le fait aussitôt effacer. Des milliers de lettres arrivent par ailleurs à Scotland Yard ou dans les rédactions des principaux journaux.

Certaines dénoncent un voisin, proposent les services d'un graphologue ou d'un médium, suggèrent un nouveau mode d'investigation. Cet investissement inédit témoigne de la vive émotion suscitée par les crimes, mais il dit aussi le désir croissant de participer aux affaires publiques. Le suffrage masculin est devenu général depuis la réforme électorale de 1884, et la démocratie progresse dans ce pays longtemps marqué par une très forte déférence sociale.

L'affaire se complique pourtant lorsque d'autres lettres signées de l'Éventreur parviennent au comité de Lusk. L'une d'elle, intitulée « From Hell » (« Depuis l'enfer »), est accompagnée d'un fragment de rein droit. On songe bien sûr à celui que le meurtrier avait prélevé sur le cadavre de Catherine Eddowes. Mais l'écriture diffère profondément de la première lettre. Beaucoup pensent à l'œuvre d'affabulateurs ou de reporters en mal de copie. Et si ledit Jack l'Éventreur n'était qu'un coup monté par les journaux, principaux bénéficiaires de cette effervescence publique ? [...]


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