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El Roslino
Les bancs diesel, indispensables aux diésélistes, subissent une érosion des ventes depuis quelques années... signe que le marché se resserre.
Longtemps chouchou des constructeurs et des automobilistes, le diesel est désormais voué à disparaître au profit de motorisations à la réputation moins sulfureuse. Or, qui dit plus de moteurs diesel, dit disparition du métier de diéséliste... ou pas.
Depuis l'affaire du « dieselgate » en 2009, cette énergie n'a plus tout à fait le vent en poupe. Entre les constructeurs qui la bannissent définitivement de leurs nouveaux modèles, la future norme Euro 7 en 2026 qui, en abaissant les niveaux tolérés pour chaque polluant, va précipiter la chute des moteurs 100 % thermiques, et les ventes de véhicules diesel qui s'érodent d'année en année, difficile d'imaginer une issue glorieuse pour les moteurs à combustion et pour le diesel en particulier.
Qu'une espèce disparaisse au profit d'une autre, cela n'est pas nouveau, c'est même dans l'ordre des choses depuis Darwin. Mais comment les acteurs du diesel, équipementiers et réparateurs diésélistes, abordent-ils ce désaveu pour une énergie qui, il n'y a pas si longtemps, était la préférée des automobilistes ?
Le diesel représente 47 % du parc automobile roulant.
Avant de sonner définitivement le glas de tout un pan de l'automobile, il convient de remettre les choses dans leur contexte. « Aujourd'hui encore, 27 % des véhicules neufs sont vendus en diesel. Sur les 39 millions de véhicules qui composent le parc automobile français, 99 % sont thermiques car n'oublions pas que les hybrides, eux aussi, disposent d'un moteur thermique.
D'autre part, les primes à la conversion ont permis de renouveler 2 millions de véhicules, mais seuls 57 % d'entre eux ont été remplacés par des véhicules neufs et en grande majorité thermiques. Bref, le diesel, aujourd'hui, c'est environ 47 % du parc roulant, soit près de 18 millions de véhicules. On ne peut pas dire que la situation a évolué très vite », explique Christophe Maurel, président de la branche des concessionnaires VP du CNPA.
Sans compter que le gouvernement maintient jusqu'au 30 juin 2021 sa prime à la conversion soutenant l'achat d'un diesel Crit'Air 2. Or, majoritairement, les diésélistes interviennent sur des véhicules âgés de 7 à 10 ans... Autant dire que l'heure de la mise en bière n'est pas tout à fait arrivée ! D'ailleurs, pour Philippe Astier, responsable marketing Europe du Sud pour Delphi Technologies : « À horizon 2040 nous savons que le moteur à combustion sur le parc va baisser et d'après nos estimations, en 2025, le parc roulant diesel sera à 36 %.
Mais le parc VO est important et nous avons vu notamment en 2020 ce qu'il s'est passé - il s'est vendu 3,4 fois plus de VO que de VN, ndlr. Ainsi, l'injection carburant sur le parc va rester en service jusqu'en 2037, que ce soit en diesel ou en essence. Forcément, cela rassure le réseau et la rechange, car ces véhicules-là, il faut continuer à les entretenir ».
Objectif : neutralité technologique.
Pourtant, si le marché du diesel, pour l'heure, plie mais ne rompt pas, quelques signes tendent à montrer que les diésélistes prennent peu à peu un nouveau virage. « Pour beaucoup de ces professionnels, le débat sur le diesel est injuste car les nouvelles motorisations ont permis de faire baisser drastiquement les émissions de particules.
Cela dit, il est vrai que des spécialistes du diesel qui s'affichaient comme tels dans leur raison sociale, se demandent si il ne serait pas préférable de changer de nom afin d'en bannir le mot “diesel”. C'est anecdotique, mais c'est assez révélateur ! », souligne Jean-François Niort, président du groupe diesel et nouvelles technologies de la Feda. Déjà, certains équipementiers ont sauté le pas.
À l'instar de Delphi Technologies qui a troqué, il y a deux ans, le nom de son réseau de réparation Diesel Service Auto pour Delphi Service Auto (DSA).
Un choix qui n'est pas dû au hasard : « Notre réseau existe depuis 25 ans. Et si nous avons fait cette modification c'est justement pour montrer que nous sommes des spécialistes qui travaillons sur tous les moteurs à combustion quels qu'ils soient, ainsi que sur les véhicules hybrides et électriques », explique Philippe Astier. Autre signe : l'érosion des ventes, depuis quelques années, de matériel pourtant indispensable aux diésélistes.
En effet : « Nous constatons qu'ils ont beaucoup stoppé leurs investissements, par exemple, sur les bancs diesel qui sont indispensables mais valent environ 150 000 €. Il s'en vend de moins en moins depuis quelques années... c'est sans doute le signe que le marché se resserre », explique Fabrice Godefroy, directeur général du groupe IDLP.
En réalité, les réparateurs diésélistes sont surtout de plus en plus nombreux à s'orienter vers les nouvelles technologies. Diésélistes, oui. Mais de plus en plus également formés aux interventions spécifiques liées aux véhicules 100 % électriques, entre autres. « En réalité, insiste Fabrice Godefroy, tous ces techniciens sont dans la diversification, et ce depuis des années. Ils ont l'expertise pour travailler sur les motorisations essence, sur les hybrides, sur le bioéthanol, et nous avons récemment organisé un stage sur le véhicule 100 % électrique... De fait, le terme générique est “diéséliste”, mais la plupart ne font pas que du diesel. Avant, d'ailleurs, on les appelait “électro-diéséliste”, et c'est dommage que ce terme se soit perdu car aujourd'hui il prend tout son sens ».
Dans le réseau Bosch Car Service, très technique par essence, aller vers les nouvelles technologies est une seconde nature. Au point que BCS s'emploie également à former ses collaborateurs sur la solution de l'hydrogène... Rappelons, s'il en était besoin, qu'en tant qu'équipementier de 1ère monte, Bosch est particulièrement bien placé sur le sujet de la pile à combustible... Ainsi, pour Jérôme Magloire, responsable marketing Bosch Car Service : « Le changement chez nous c'est tout le temps. L'idée étant de prendre le marché tel qu'il est et sur des véhicules très récents.
Nous maintenons nos niveaux de compétences, bien sûr, mais nous n'allons pas forcer sur le diesel alors que nous savons que le marché bouge. Finalement, la disparition annoncée du diesel ne nous effraie pas, le tout c'est de s'y préparer et de suivre l'évolution du marché en diversifiant ses connaissances et son expertise ».
Idem chez DSA qui, parmi ses 130 adhérents, a d'ores et déjà identifié une cinquantaine d'experts prompts à se tourner vers les nouvelles technologies, et notamment vers l'électrique, et à investir pour y parvenir. Au-delà de l'accompagnement technique qu'elle offre à ces adhérents motivés, l'entité Dephi/BorgWarner (qui fournit aujourd'hui 99 % des pièces liées à l'électrique en 1ère monte), mettra des solutions plug and play à disposition du marché de la rechange d'ici la fin de l'année. Reste que pour tous ces spécialistes de la réparation, les questions de savoir si il convient de sauter le pas, quand et dans quelle mesure, ne trouvent pas toujours de réponses évidentes. Pour la Feda, une étape intermédiaire se met alors en place :
« C'est l'éco-entretien. Cela s'adresse à tout le monde, mais certains diésélistes s'emparent de cette démarche car cela a du sens par rapport au métier », estime Jean-François Niort.
Des concessionnaires autos en première ligne.
Enfin, quid des ateliers de concessions ? Contrairement à la rechange indépendante qui profite de l'inertie du parc pour continuer à travailler le diesel tout en se préparant tranquillement à l'avenir, les ateliers de concession, eux, subissent de plein fouet le changement de braquet des constructeurs sur les véhicules hybrides et électriques.
Ainsi, comme l'explique Christophe Maurel : « Dans les réseaux de distribution et de réparation constructeur, la fidélité à la concession est valable sur les 3 à 4 premières années du véhicule, et comme il y a moins de ventes de diesel, nous aurons dès cette année deux fois moins de diesel en atelier, c'est évident.
En revanche, il y a plus d'hybridation thermique avec de la maintenance, et il y a aussi de l'entretien sur l'électrique. En réalité, il y a un jeu de vase communicant qui explique que du côté des ateliers de concession, le travail ne s'est pas dégradé ».
Sans compter que les concessions capitalisent également beaucoup plus sur des véhicules plus âgés, avec des garanties étendues à cinq ans et des kilométrages plus élevés... une source de chiffre d'affaires supplémentaire indéniable pour les ateliers. Reste que si les concessionnaires sont eux aussi adaptables, ils le sont un peu à marche forcée, leurs interventions, encore une fois, étant principalement réalisées sur des véhicules récents.
Et Christophe Maurel du CNPA d'expliquer : « Le profil des mécaniciens change très vite car il y a une explosion des technologies embarquées dans l'auto, des motorisations thermiques de nouvelle génération qui nécessitent un vrai savoir-faire... Cela veut dire beaucoup d'informations techniques, beaucoup d'apprentissage que l'on a triplé ces quatre dernières années, des outillages spécifiques...
Donc de lourds investissements sur la partie maintenance dans la concession pour être capable de réparer les véhicules de toutes sortes. Rien que sur l'outillage spécifique, cela suppose environ 40 000 € d'investissement minimum par atelier pour réparer des véhicules électriques, hors formation et hors apprentissage ».
Des avances nécessaires mais qui n'offrent, pour l'heure, que peu de ROI. Ironie de l'histoire : si les concessionnaires peuvent donc aujourd'hui investir de telles sommes sur ces technologies d'avenir, c'est uniquement grâce au trafic, en ateliers, des véhicules thermiques !
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